PÉCHÉ OU PÊCHER? UN PEU D’ÉTYMOLOGIE POUR ALLER À LA PÊCHE AU SENS…

Un des mots du vocabulaire chrétien les plus difficiles à faire passer et faire comprendre en français, est le mot « péché », pris comme nom, de même que le verbe « pécher » qui signifie « commettre un ou des péchés ». Ils sont difficiles à faire passer d’abord en raison de leur consonance même, qui les fait confondre soit avec la pêche au poisson, soit avec l’arbre fruitier le pêcher, qui porte des « pêches » : ils sont en effet homonymes, c’est-à-dire que tout en ayant une même prononciation, ils ont un sens différent.

Ceux qui ne sont pas trop familiers avec la langue française et encore moins avec le vocabulaire de la Bible sont immédiatement déroutés par ces deux mots, qui sont utilisés avec une connotation négative par les chrétiens.  « Pécher » c’est faire quelque chose de mal aux yeux de Dieu, c’est donc lui déplaire et encourir son juste jugement.  La première réaction de beaucoup est de penser : mais qu’y a-t-il de mal à partir à la pêche, en quoi cela peut-il déplaire au Dieu des chrétiens ?  Et pourquoi est-ce mal de manger les fruits du pêcher?  S’agirait-il de ce fameux arbre dont Adam et Eve ont mangé et qui constitue la transgression initiale pour les chrétiens?

Un peu d’étymologie nous aidera à y voir plus clair.  Le verbe pêcher (avec accent circonflexe sur le « e »)  vient du latin tardif piscare, qui signifie aller prendre du poisson.  Comme  très souvent en français, la disparition progressive de la lettre « s »  au cours du temps, a  été remplacée par l’élongation de la voyelle qui la précède, marquée par un accent circonflexe.  En revanche, le verbe « pécher » (avec accent aigu sur le « e ») vient d’un autre verbe latin : peccare.  Deux mots latins de consonance assez proche donc, mais qui au cours du temps se sont presque confondus alors que leur signification est bien sûr très différente.  Quant à l’arbre fruitier le pêcher (avec accent circonflexe sur le « e ») il provient lui aussi d’un mot latin : persica, c’est-à-dire le « fruit de Perse » car il a été introduit en Europe dans l’Antiquité à partir de l’Asie Mineure.  Il s’agit donc d’une troisième étymologie qui a contribué à former un autre homonyme en français, ce qui n’est évidemment pas fait pour aider tous ceux qui cherchent à comprendre de quoi parlent les chrétiens.  Une fois qu’on a saisi la différence entre ces mots et la raison de cette différence, qui tient à l’histoire de la langue, on ne pensera pas que les chrétiens raisonnent en termes de phobies alimentaires, lorsqu’ils parlent du « péché ». Remarquez d’ailleurs que dans les autres langues, ce problème d’homonymie ne se pose pas comme en français : par exemple en anglais, le « péché » (au sens biblique de transgression du commandement divin), se dit sin, de même que le verbe « pécher » (to sin).  Aller à la pêche, se dit : to go fishing.  Et l’arbre fruitier c’est le peach tree.

L’homonymie, c’est-à-dire l’identité de prononciation de deux ou plusieurs mots qui ont des sens différents, peut jouer des mauvais tours à ceux qui ne connaissent pas très bien une langue. Elle permet aussi des jeux de mots subtils, pour celui qui sait jouer avec l’ambiguïté des consonances et des significations. Pensez un peu aux homonymes suivants : un ver (de terre) ; un verre (de vin) ; le vert (la couleur) ; le verre (le matériau) ; le vair (la  fourrure grise et blanche à partir de l’écureuil nordique le petit-gris) ; vers (en direction de) ; un vers (poétique).

Pour revenir au vocabulaire chrétien, deux homonymes latins ont joué quelques mauvais tours dans la compréhension du passage de la Genèse sur l’arbre de la connaissance du bien et du mal (au second et troisième chapitre): le mot « mal » vient du latin mălum.  Or le mot mālum  (avec un accent différent sur le « a ») signifie « pomme ».  Comme le mot latin « pomum » veut dire, lui, « fruit », l’assimilation du fruit défendu de l’arbre de la connaissance du bien et du mal à la pomme (mālum) s’est faite assez naturellement.  Et cette assimilation à la pomme est passée dans la plupart des représentations visuelles de la scène de la tentation d’Eve par le serpent. Mais rien dans le texte original hébreu ne fait mention d’une pomme, ou d’un fruit bien particulier. On trouve d’ailleurs dans certaines églises des représentations du fruit de cet arbre sous forme de figue, de grenade ou de raisins.  En fait la signification du passage de la Genèse sur l’arbre de la connaissance du bien et du mal ne dépend en rien d’un fruit particulier (pomme, poire ou pêche). Essayer de la lier à tel ou tel fruit ne peut produire que de mauvais fruits sur le plan de la compréhension du texte en la détournant de son objet.  Le coeur de texte en l’occurrence, c’est le manque de confiance d’Eve en la Parole de Dieu et la manière dont le tentateur a su créer l’illusion d’une parole autorisée et bénéfique pour l’humanité tout en étant en opposition avec celle de Dieu.  C’est dans ce renversement d’autorité et dans la séduction d’un discours prétendument émancipateur pour l’homme et la femme, que se situe la Chute de l’humanité, désormais livrée aux conséquences destructrices de l’aliénation avec le seul vrai Dieu.

Consommez donc du poisson, des pêches et des pommes de qualité avec la plus grande joie, mais sans jamais oublier de rendre grâces à celui qui a tout créé et vous accorde dans sa Providence de pouvoir vous nourrir jour après jour!

Eric Kayayan
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