Ineffable : d’après le Petit Robert, ce mot signifie : « Qui ne peut être exprimé par des paroles ». Deux équivalences sont données ensuite : Indicible, inexprimable. Dans son premier article, la Confession de foi dite de La Rochelle ajoute cet attribut de Dieu à ceux qu’elle a énoncés auparavant. Je cite cette dernière partie de l’article en question : … ineffable, qui peut toutes choses, qui est toute sage, toute bonne, toute juste, et toute miséricordieuse.
Mais le qualificatif d’ineffable est-il bien un attribut divin ? N’est-ce pas plutôt la conséquence des précédents, à savoir que devant l’immensité, l’éternité, la sainteté de l’Être divin, on est d’une certaine manière réduit au silence, on ne peut que reconnaître notre incapacité à exprimer en termes humains ce qui nous dépasse totalement, ce qui fait de Dieu un être absolument autre ? Il ne saurait jamais être enserré ou limité par nos propres conceptions ou définitions. Il y a là bien sûr un paradoxe, puisque c’est seulement après avoir énoncé les attributs divins – caractère spirituel, unité et simplicité, éternité, invisibilité, immutabilité, infinité, incompréhensibilité – que vient nécessairement à l’esprit cette notion d’ineffabilité. Elle ne signifie d’ailleurs pas dans la Bible que Dieu ne s’exprime pas, ou ne se révèle pas aux hommes, mais que devant sa majesté, on est réduit à l’adoration, à l’abaissement de soi-même, à l’abandon de toute vaine gloire.
Dans un passage de sa seconde lettre aux chrétiens de Corinthe, l’apôtre Paul, qui se voyait forcé par certains d’entre eux à défendre l’authenticité de son apostolat, leur déclare, en parlant de lui-même : Je connais un homme en Christ qui, voici quatorze ans – était-ce dans son corps ? Je ne sais pas ; était-ce hors de son corps ? Je ne sais, Dieu le sait – fut enlevé dans le paradis, et qu’il entendit des paroles ineffables qu’il n’est pas permis à un homme d’exprimer. Je me glorifierai d’un tel homme, mais de moi-même, je ne me glorifierai pas, sinon de mes faiblesses. Le même Paul, après avoir exposé dans sa lettre aux chrétiens de Rome la révélation concernant le salut des hommes exclusivement fondé sur la Grâce divine, conclut cette partie de sa lettre (à la fin du onzième chapitre) par une doxologie soulignant la notion d’incompréhensibilité des jugements divins, qui ne peut mener qu’à l’adoration et la glorification de son nom. Il cite d’ailleurs un passage du livre du prophète Ésaïe pour ce faire : O profondeur de la richesse, de la sagesse et de la connaissance de Dieu ! Que ses jugements sont insondables et ses voies incompréhensibles ! En effet, « Qui a connu la pensée du Seigneur, ou qui a été son conseiller ? » Qui lui a donné le premier, pour qu’il ait à recevoir en retour ? Tout est de lui, par lui et pour lui ! A lui la gloire dans tous les siècles. Amen !