Nous ne vivons pas à une époque où la bienveillance est une marque frappante de notre culture, c’est le moins qu’on puisse dire. Les médias rapportent de plus en plus souvent des cas de manque de civilité dans la vie quotidienne, voire des agressions de toutes sortes, parfois extrêmement violentes. On parle même couramment d’ensauvagement de la société depuis plusieurs années. Et si nous parlions un peu de “bienveillance” à l’aube d’une année nouvelle, que les chrétiens appelleront une année de Grâce en dépit de toutes les apparences contraires, car pour eux elle est de toutes manières placée sous le contrôle de la providence divine?
Le terme grec correspondant à notre mot « bienveillance » apparaît quatre fois dans le Nouveau Testament, dans les lettres que l’apôtre Paul a adressées aux toutes jeunes églises chrétiennes. Il s’agit d’abord de la bienveillance de Dieu, mais également de la bienveillance que les croyants sont appelés à exercer vis-à-vis des autres. Dans la lettre de Paul aux Galates, la bienveillance est listée comme un des fruits de l’Esprit Saint dans la vie des croyants (5.22). Elle est même distinguée de la bonté, terme qui la précède dans la liste de ces fruits de l’Esprit.
Mais que signifie au juste: “être bienveillant” ? Il s’agit d’une attitude vis-à-vis du prochain qui cherche avant tout son bien, et ne l’envisage pas comme une personne à ignorer, dominer ou exploiter. Il y a bien entendu des degrés divers d’expression de cette bienveillance, suivant le degré de proximité que l’on entretient avec une ou des personnes particulières. Cependant l’attitude générale demeure la même.
Dans la vie courante, nous sommes constamment mis en présence d’autres personnes, connues ou inconnues. La courtoisie, une salutation, une parole aimable, un sourire, le tout sans hypocrisie ou sans motifs cachés, font partie de cette nécessaire bienveillance vis-à-vis des autres. C’est une première expression du commandement enjoignant d’aimer son prochain comme soi-même, même si évidemment ces expressions de bienveillance au quotidien n’épuisent pas la signification et les implications de ce mot. S’intéresser aux autres, à leur vie personnelle, leurs soucis et problèmes, sans pour autant s’immiscer indûment dans leur vie privée, savoir montrer de l’empathie, proposer de l’aide quand on est en mesure de le faire, sans pour autant chercher à s’imposer, voilà quelques autres marques d’une bienveillance sincère.
Le narcissisme, le nombrilisme et l’égocentrisme sont des marques de fabrique évidentes de notre époque matérialiste. On constate à quel point les personnes que l’on rencontre adorent parler d’elles-mêmes, de leurs propres problèmes, de santé ou autre, de leurs projets et succès, sans jamais s’intéresser à leurs interlocuteurs et à leurs propres soucis ou projets. On ressort vite épuisé de ce type de monologue. Dans la Bible, un proverbe (19.22) est traduit de la manière suivante : Ce qui fait le charme d’un autre, c’est sa bienveillance. Une autre traduction donne : Ce qu’on apprécie chez un homme, c’est sa bonté.
A propos de la bienveillance de Dieu, le psaume 89 commence ainsi : Je chanterai toujours les actes bienveillants de l’Éternel ; ma bouche fera connaître ta fidélité de génération en génération. Car je dis : la bienveillance est bâtie pour l’éternité. C’est avant tout dans le don de la personne de son Fils éternel bien-aimé, Jésus-Christ, que l’Éternel a manifesté sa bienveillance envers les hommes. Et c’est cette personne du Fils éternel devenu homme pour sauver des pécheurs perdus, qui demeure le modèle ultime de notre propre bienveillance à l’égard des autres.
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