Voici la seconde partie de l’introduction du commentaire de Jean Calvin (1509-1564) à son commentaire sur le livre des Actes des Apôtres, qui date de 1554. J’en ai publié la première partie sur ce blog il y a quelques jours, pour stimuler une réflexion solidement fondée sur la Bible en cette période du calendrier liturgique chrétien se situant entre l’Ascension et la Pentecôte. Notez la phrase suivante de Calvin sur le livre des Actes : Tous ces sujets sont si bien traités qu’il ne faut pas aller chercher ailleurs un vrai résumé de la piété et de la religion chrétienne.
« Il y a encore davantage: nous avons le récit de quelques sermons prononcés par les apôtres, qui parlent de la miséricorde de Dieu, de la grâce du Christ, de l’espérance de l’immortalité bienheureuse, de l’invocation de Dieu, de la pénitence, de la crainte de Dieu, et d’autres points principaux de l’enseignement divin. Tous ces sujets sont si bien traités qu’il ne faut pas aller chercher ailleurs un vrai résumé de la piété et de la religion chrétienne. C’est une chose bienséante et utile de connaître comment a commencé l’Eglise chrétienne, comment les apôtres se sont mis à prêcher l’Evangile, quel progrès ils ont fait, et malgré tout quels combats il leur a fallu livrer, comment ils ont poursuivi avec joie et puissance leur cours malgré tous ces obstacles, comment, sous la honte de la croix ils ont merveilleusement triomphé de toutes les bravades et de l’orgueil du monde, comment Dieu leur est venu en aide par des moyens extraordinaires. Nous devons donc bien faire attention à ce livre car sans lui la connaissance de ces choses si grandes serait soit complètement ensevelie et perdue, soit très embrouillée et obscure, voire douteuse et incertaine. Car nous voyons bien qu’à cet égard Satan a employé toute sa ruse pour faire qu’on ne trouve plus rien des actions des Apôtres, sinon de manière corrompue et barbouillée de mensonges, afin de rendre suspect tout ce qu’on dirait d’eux, afin d’effacer par ce moyen tout souvenir de cette époque de la mémoire des fidèles. En effet il a suscité d’une part de sots rêveurs, d’autre part des moqueurs bien rusés, qui, sous des noms d’emprunt, ont propulsé des fables bien mal ficelées dont l’absurdité a enlevé toute autorité même aux récits véridiques. Par exemple: on voit je ne sais quels petits livres produits par un certain Linus, qui parlent de saint Paul, et de saint Pierre, et où il y a tant de niaiseries stupides, qu’il semble qu’on ait voulu faire rire exprès les incroyants, et causer du dépit aux gens de bien. Il y a aussi la grande dispute qu’on a inventée entre saint Pierre et Simon le Magicien, qui est si ridicule qu’elle déshonore vraiment la chrétienté. On peut dire de même de tout ce mélange intitulé “Les revues et les conciles de Clément”, qu’on trouve mentionné dans tout le galimatias de Gratien. Bien qu’il ne s’agisse que de fariboles sans aucune ombre de vérité, comme elles sont parées de noms d’auteurs anciens, les gens simples sont trompés, et les malins n’ont pas honte de les mettre en avant avec beaucoup d’assurance, comme s’il s’agissait d’arrêts du ciel. Satan a menti on ne peut plus, afin que nous n’ayons aucune certitude des choses qui se sont passées depuis que Christ est monté au ciel. Et en fait, si ce livre de saint Luc n’avait pas survécu pour nous servir de registre où sont consignés les faits, il semblerait que Christ montant au ciel n’ait laissé dans ce monde aucun fruit de sa mort et de sa résurrection. Car tout souvenir en serait perdu, tout autant que la présence de son corps. Nous ne saurions pas qu’il a été reçu dans la gloire céleste de telle manière qu’il exerce une domination souveraine partout dans le monde. Nous ne saurions pas que l’enseignement de l’Evangile a été publié par le ministère des Apôtres, afin qu’elle parvienne jusqu’à nous de main en main, quel que soit le temps qui nous sépare d’eux. Nous ne saurions pas qu’ils ont reçu le Saint Esprit pour ne rien enseigner d’autre qui ne vienne de Dieu, et cela afin que notre foi soit fondée sur la vérité ferme et certaine. Finalement nous ne saurions pas qu’a été accomplie la prophétie d’Esaïe où il a prédit que la Loi sortirait de Sion, et la Parole de Dieu de Jérusalem. Donc puisque ce livre, qui sans aucun doute a été donné par le Saint Esprit, nous donne un témoignage certain de toutes ces choses, je répète et je maintiens ce que j’ai dit tout à l’heure à bon droit: nous devons le considérer comme un trésor tout à fait unique. »